Passée sous le contrôle de Fiat en 1969 ; Lancia va cependant
poursuivre la production de modèles purement "maison" tels les Fulvia
et Flavia. Mais leur développement étant arrivé à son terme, il faut
bien envisager leur succession. Une mission dévolue à la série β qui
va devoir démontrer aux puristes qu'une Lancia "sous influence" n'est
pas forcément abâtardie.
Nous sommes en 1970 et
l'ingénieur en charge du projet, Sergio Camuffo, s'est vu assigner une
tâche difficile : concevoir en trois ans une nouvelle Lancia aussi
raffinée que le nom l'exige, mais avec un budget limité. Si le choix
de la traction avant, une constante chez Lancia depuis 1960, s'impose
d'emblée, l'étude d'un nouveau moteur est exclue. Ce ne serait ni un "4
à plat" comme celui des Flavia, ni un V4 comme celui des Fulvia, mais
un 4 en ligne d'origine Fiat. Une origine tout à fait respectable,
puisque ce "double arbre" connu depuis 1967 sur les Fiat 124 a comme
auteur l'ingénieur Aurelio Lampredi, venu de chez Ferrari. Trois
cylindrées (1438, 1592 et 1756 cm3) seront alors prévus.
La nouvelle Lancia sera
une berline plus spacieuse et moins coûteuse que la 2000 appelée à
s'effacer, avec un dessin suffisamment original pour assurer sa
personnalité. C'est le Centro Stile Fiat qui fera le choix de la
formule "deux volumes et demi" que peu de constructeurs ont encore
osée. Pour son nom de baptême, il est décidé de revenir à la tradition
Lancia d'utiliser l'alphabet grec, en repartant du début : si Alpha
est écarté d'emblée pour ne pas créer de confusion gênante avec la
firme milanaise, Beta est retenu. Une Lancia avait déjà porté ce nom
en 1909, diffusée à 150 exemplaires seulement.
![](BETA-BERLINE/beta-berline003-mini.jpg)
C'est au Salon de Turin
que la Lancia Beta réserve sa sortie, en novembre 1972. Les premiers
commentaires sont assez flatteurs, surtout à propos de son équipement
qui la place en tête de sa catégorie : boîte 5 rapports, freinage
assisté à 4 disques avec compensateur de charge, double optique à
iode, compte-tours, volant réglable, sellerie tissus soignée, et même
en option climatisation et sellerie cuir. En 1973, la presse dévoile
un coupé Beta, dessiné en interne par Pietro Castagnero, qui ne fera
sa première publique qu'à Francfort en septembre. Ses moteurs 1600 ou
1800 étant plus puissants que ceux des berlines, il rencontrera
d'emblée un grand succès tant sur le marché italien qu'à l'export.
Pininfarina ne tarde pas à en extrapoler un Spyder, plus un coupé
découvrable qu'un vrai cabriolet. Exposé par ce carrossier au Salon de
Genève 1974, il sera cependant confié à Zagato pour sa production en
série. Enfin une quatrième version sera présentée à Genève l'année
suivante : la Beta HPE, pour High Performance Estate. L'idée de ce
"break de chasse" très réussi est due au directeur général Pier-Ugo
Gobbato, mais le dessin est également à créditer à Pietro Castagnero.
Dès l'automne 1975, la
berline est retouchée, avec des surfaces vitrées agrandies et des
phares sous "vitrine", tandis que l'offre de moteurs est remaniée. Le
1800 est porté à 2 litres, le 1400 est réduit à 1300 et un nouveau
1600 remplace le précédent. Cette Beta berline Série 2 bénéficie en
outre d'une direction assistée, en série sur les 2000, en option sur
les 1600. La même année apparaît un nouveau coupé Grand Tourisme
dénommée Beta Montecarlo. Cette auto n'aurait jamais du naître, du
moins pas sous l'écusson Lancia. En effet, il s'agit à la base d'un
projet Fiat, portant la désignation en interne Tipo 137 et qui devait
être commercialisé sous le nom de Fiat X1/20 : c'est d'ailleurs sous
ce nom que Pininfarina la présente au Salon de Genève en 1975, alors
que quelques stands plus loin, une auto semblable paraît sous le label
définitif Lancia Montecarlo. Le carrossier, qui va en assurer sa
production, a incorporé dans cette biplace à moteur central quelques
uns de ses thèmes favoris (arceau de sécurité intégré, arêtes
plongeantes prolongeant la ligne du pavillon et encadrant un capot
plat, etc...). Sous ce capot s'ouvrant comme un livre se trouve un
moteur 2 litres de 120ch.
![](BETA-MC/beta-montecarlo006mini.jpg)
Complétée par la
Montecarlo, la Lancia Beta ne sera jamais seule au catalogue,
puisqu'il ne s'écoule que quelques semaines d'été entre l'abandon du
coupé Fulvia en juin 1976 et la sortie de la belle Gamma ; de plus le
réseau se charge depuis quelques temps de la distribution des
craquantes Autobianchi A112. Courant 1978, on note une nouvelle
calandre sur les Coupé, Spyder et HPE (Série 2), ainsi que
l'apparition de la transmission automatique sur les versions les plus
puissantes. Durant la même année, et ce en dépit des succès en
compétition, la production de la Montecarlo se voit arrêtée.
Annoncée à l'automne
1979, la troisième mouture des berlines Beta n'apparaît que
discrètement modifiée à l'extérieur : on note cependant une calandre
commune aux Delta et nouvelles Gamma (deuxième génération), mais à
l'intérieur, le styliste Mario Bellini a résolument joué la carte
futuriste avec une planche de bord truffée de multiples alvéoles
disposées en diagonale abritant les différents interrupteurs et
voyants, ainsi qu'un moniteur de contrôle des feux. La berline va
progressivement s'effacer au profit de la Trevi présentée en 1980 avec
sa ligne "trois volumes" qui revient en vogue. Il s'agit en fait d'une
Beta berline modifiée par Pininfarina. En mars 1980, le même
Pininfarina propose une nouvelle Montecarlo quelque peu modifiée et
reprenant la fameuse calandre type Delta.
La Trevi aura au Salon
de Turin en 1982 la primeur de la motorisation VX alias Volumex :
plutôt qu'un turbo, l'ingénieur Lampredi a choisi une suralimentation
par compresseur volumétrique soufflant dans un carburateur double
corps. Le but de cette étude est en fait de développer puis
d'homologuer une motorisation plus puissante pour la Lancia 037 de
compétition, tout en amortissant les coûts sur les modèles de
production. Ainsi "boosté", le 2 litres Lancia développe 136ch. Les
Coupés et HPE (rebaptisés HP Executive en 1981) seront également
proposés en version VX à partir du printemps 1983, jusqu'à la fin de
production courant 1984. Entre temps, les Spyder et Montecarlo auront
quitté les chaînes de production dès 1981.
D'après Rétroviseur N°184
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